Depuis longtemps la pente du libéralisme et de son corollaire immédiat, l'individualisme, est prise. Depuis les années 80 je dirais. Digne fille illégitime de mai 68, elle a profondément changé les représentations sociales que les gens se font d'eux-mêmes dans notre pays. Ce changement de représentation a finalement influencé toute la société civile, associative et syndicale. Le mouvement actuel autour de la réforme des retraites dans notre pays en est le signe.
Peu de grévistes mais un fort soutien dans les manifs. En fait, tout le monde se sent classe moyenne et en même temps chacun sent bien que l'ascenseur social ne fonctionne plus. Chacun se sent relégable et personne ne se sent à l'abri de la précarisation.
En plus, depuis longtemps, ce qui reste de représentation collective à gauche est devenu le plus souvent inopérante. En effet, ce qui sert de matrice est le plus souvent le marxisme. Je pense que Marx est un des plus grand penseur de la modernité, pour autant une théorie construite au 19ème siècle ne peut être plaquée sur la réalité sociale et économique du monde en 2010 sans y apporter quelques nuances et sans en changer quelques paramètres, sauf à vouloir tout travestir, la théorie de Marx, la réalité actuelle et surtout à rendre inaudible, au-delà des convaincus, une critique nécessaire de cette réforme et totalement inefficace l'organisation de la lutte contre celle-ci.
En fait plus personne ne reconnait la pertinence des classes. Je peux l'admettre d'autant que qui dit classe, dit conscience de classe, conscience elle-même définie selon les termes Hégelien, c'est-à-dire contenu et contenant de conscience. Bref tout cela pour dire que effectivement les classes n'ont peut-être jamais existé comme sujet politique conscient et actif en tant que tel. Mais, pour autant, elles sont identifiables de façon extérieure et peuvent même faire l'objet d'analyse, historique, sociologique, économique. Elles existent bien donc. Ce qui a changé ce sont plus les conditions de vie et travail ainsi que le rapport non pas au salaire mais au revenu. Je m'explique: dans la doxa marxiste, il y a ceux qui possèdent le capital et les autres. Je ne crois pas que l'on puisse encore poser les choses ainsi. Y a-t-il plus ou moins de différence entre un salarié du tertiaire et un petit artisan, qu'entre ce même petit artisan et PDG de grande entreprise qui pourtant est lui aussi salarié ? La réponse est évidente. La détention ou non du capital n'est plus le seul mode d'appréciation et ne peut plus l'être. Alors? me direz vous...
Que si chacun se considère dans une espèce de monstrueuse classe moyenne, tous les repères sont perdus. Mais surtout que cette perte a fini par atomiser le corps social. L'individu a donc fini de conquérir son autonomie et sa liberté individuelle. Et perdu du même coup toutes les solidarités sociales qui lui permettaient de se protéger mais aussi d'acquérir de nouveaux droits sociaux. Cette conception selon laquelle l'appartenance à un groupe dont l'intérêt collectif peut l'emporter sur l'intérêt particulier serait liberticide. En plus d'être fausse, il suffit de lire le livre 1 "Du contrat Social" de Rousseau pour en avoir la certitude. C'est bien cette conception qui a germée dans les esprits depuis 68 et qui a effectivement fait échouer notre société là où elle est aujourd'hui. Quelle est la liberté d'une femme isolée avec enfant qui subi un temps partiel au smic horaire ? Incapable de s'organiser structurellement, le soutien de la population aux grévistes est bien la preuve de cette incapacité. Elle est aussi un soubresaut ! Est-ce celui d'un agonisant ou celui d'une renaissance ?
To be continued...
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